L’amélioration des conditions de travail des salariés est un enjeu majeur pour l’industrie agroalimentaire. Pour attirer les talents dans un secteur d’activité qui peine à recruter, réduire la pénibilité permet de soigner sa marque employeur. La manutention des poudres et ingrédients à tous les stades de la chaîne de production est une source majeure de pénibilité. L’alimentation des machines génère ports de charge, inhalation de poussières, tâches de nettoyage contraignantes et autres risques opérateurs. Face à cet enjeu, pourquoi et comment réduire la pénibilité des équipes agro-industrielles ?
Au sortir des trois confinements, une très grande majorité des consommateurs affirment qu’ils garderont les habitudes initiées pendant cette période :
Au-delà de cette quête individuelle du mieux manger, on observe aussi une prise de conscience collective d’enjeux sociétaux. Au moment de choisir ses produits dans les rayons alimentaires, le nouveau « consomm’acteur » est attentif au gaspillage, à la protection de l’environnement, au bien-être animal et à la juste rémunération des producteurs. À ces nouvelles exigences, s’ajoute la prise en considération des conditions de travail au sein des entreprises qui fabriquent ces produits. Prendre soin de ses salariés, c’est donc soigner son image de marque !
Chaque année, 20 000 postes sont non pourvus dans les usines alimentaires. Un déficit d’attractivité imputable à une mauvaise réputation. Les conditions de travail y sont vues comme difficiles. Les profils techniques qualifiés fuient un secteur industriel perçu comme faiblement industrialisé et technologiquement en retrait. Les industriels du secteur alimentaire l’ont compris : pour fidéliser leurs collaborateurs et en recruter de nouveaux, ils doivent investir dans les conditions de travail et de sécurité.
Certaines idées reçues ont la vie dure au sein des instances décisionnaires. Souvent indissociables de visions trop court-termistes, elles biaisent l’analyse du retour sur investissement, privant l’entreprise de gains de rentabilité rapides.
Quatre pièges majeurs sont à éviter lors d’un choix d’investissement :
Cette dimension humaine est pourtant primordiale. Les outils industriels n’exprimeront leur plein potentiel que si les agro-industriels parviennent à fidéliser leurs effectifs compétents et à recruter la main d’œuvre. C’est le capital humain qui assure la mise en œuvre des leviers de croissance. Ce n’est pas un hasard si les responsables qualité et HSE sont de plus en plus souvent parties prenantes dans les décisions d’investissement.
L'amélioration des conditions de travail et les gains de productivité sont intimement liés. L’Efficience productive d’une chaîne de production alimentaire résulte de la somme de :
Quand la réduction de la pénibilité est l’objectif premier d’un projet d’investissement, d’autres effets bénéfiques sont rapidement mesurables. Des postes de travail ergonomiques améliorent la productivité. L’automatisation garantit la qualité produite. La sécurisation réduit les accidents du travail. La rentabilité de l’unité de production est ainsi positivement impactée.
Parfois, l’amélioration des conditions de travail est la conséquence d’un objectif initialement centré sur le rendement. La baisse de l’absentéisme et des accidents du travail accélère alors le retour sur investissement.
Au premier rang des causes de TMS (Troubles Musculo-Squelettiques) et des risques professionnels, nous trouvons :
Vider des sacs de 25 kg de sel, de sucre ou de farine à bout de bras restent pratiques courantes dans les ateliers agroalimentaires. Les positions inconfortables voire en équilibre précaire sont encore observées pour accéder à l’alimentation d’une cuve ou d’un mélangeur.
Des systèmes de transfert des poudres simples permettent le dépotage des ingrédients secs sans effort et en toute sécurité. Des solutions existent pour supprimer le déplacement des sacs et le dessachage manuel.
Qui dit manutention de poudres et ingrédients secs en vrac, dit génération de poussières. Les risques liés à l’empoussièrement pour les opérateurs des lignes de production alimentaires sont multiples :
On pourrait y ajouter les conséquences sur la rentabilité avec la déperdition de matière, les risques de contaminations croisées, les temps de nettoyage induits, voire la dégradation des matériels connexes.
Il est possible d’agir contre l’empoussièrement. L’idéal est de minimiser la création de poussières. À défaut, des systèmes de confinement réduisent la dispersion des particules dans l’air.
L’hygiène des ateliers alimentaires est un impératif sanitaire. Les tâches de nettoyage sont donc stratégiques mais peu valorisantes pour le personnel de production. L’accès aux zones à nettoyer peut même s’avérer complexe et pas toujours sans danger.
Limiter la pénibilité du nettoyage tout en améliorant l’hygiène des ateliers, c’est possible.
Les postes vide-sacs offrent des solutions simples pour vider des sacs, des cartons ou des fûts de poudres, de mélanges ou des ingrédients. Ils réduisent la pénibilité de la tâche de dessachage :
Souvent équipées d’une stock tampon intermédiaire, les trémies vide-sacs constituent aussi un premier niveau d’automatisation. Ils peuvent être équipés de hottes pour le dépoussiérage et sont parfois mobiles.
La société Bigallet propose des sirops traditionnels et une gamme de sirops Bio. Depuis son site industriel de Val-de-Virieu, l'entreprise a installé un système simple et ergonomique d'alimentation en sucre de ses cuves de préparation. Depuis, plusieurs effets bénéfiques sont mesurés sur place. Aussi bien sur la qualité des produits que sur la productivité de la chaîne.
La manutention de sacs peut être évitée en choisissant d’autres modes d’approvisionnement. Selon les quantités consommées, les big-bags ou les silos sont à privilégier. Dans ce cas, les ingrédients sont prélevés mécaniquement à l’intérieur des contenants plutôt que transvasés manuellement. Ils sont acheminés en toute sécurité et sans intervention humaine vers les machines de production ou de conditionnement.
L’extraction du contenu des big-bags est gérée grâce à des stands de vidange. De multiples solutions existent pour tous les budgets et tous les niveaux d’automatisation. Très sécurisées, ces videuses big-bags sollicitent un personnel du service logistique plutôt qu’un personnel de production.
Depuis son usine de Chambéry, le groupe Cémoi a automatisé l'alimentation en amidon de sa ligne de fabrication de bonbons gélifiés et cristallisés. Là aussi plusieurs bénéfices : moins de peine dans l'exécution des tâches manuelles et réduction du taux des déchets de 1,8% à 0,7% lors du processus de cristallisation.
À défaut de pouvoir éviter la génération des poussières, des équipements existent pour les confiner au mieux. Les hottes de confinement et d’aspiration s’adaptent sur les vide-sacs ou les tamiseurs. Elles évitent, en particulier, la dispersion de poudres volatiles voire irritantes comme certaines épices. Pour les étapes de conditionnement en big-bags ou en sacs, des joints gonflables assurent l’étanchéité au moment du remplissage.
Filiale du groupe Agromousquetaires (Intermarché), le Moulin de la Chaume, situé à La Voulte sur Rhône (07), a joué sur la pénibilité de ses opérateurs lors du transfert de farine de fleurage. De quoi limiter l'empoussièrement de l'atelier tout en limitant les arrêts de lignes.
Limiter la pénibilité du nettoyage des ateliers nécessite une réflexion en amont de tout projet d’investissement. Cela commence par le choix du lieu de stockage des matières premières. La bonne pratique consiste à séparer les zones de stockage des zones de production :
La réflexion se poursuit par le choix de la technologie de transfert des ingrédients. Préférer un mode de transport confiné présente plusieurs avantages :
Enfin, il s’agit de choisir les équipements appropriés. Il existe, en particulier, des matériels de conception hygiénique :
Filiale du groupe Galapagos, le fabricant de pâtes alimentaires Alpina Savoie, basé à Chambéry (73), a traversé ces réflexions. La société s'est dotée d’une installation de transfert de poudre d’œuf. De quoi répondre plus fortement à des exigences élevées de nettoyabilité et de précision de dosage.
Les conditions de travail en agroalimentaire sont directement corrélées à la logistique interne des ingrédients secs. Mais au-delà de la réduction de la pénibilité, ces projets d’optimisation du process poudres présentent bien d’autres vertus fédératrices. En s’intéressant au vécu des employés, en leur donnant la parole, on implique et on responsabilise les équipes.
Des missions à plus haute technicité offrent des perspectives d’évolution. Les responsables techniques sont motivés par la mise en place de nouveaux process automatisés. En intégrant cette dimension humaine dans la réflexion, les choix d’investissement gagnent en justesse technique. Les projets emportent l’adhésion et atteignent plus vite leur niveau de rentabilité.